L’Association pour le Progrès des Communications (APC) remarque, avec une grave préoccupation les restrictions sur l’accès à Internet (communément appelé Coupure de l’internet) commandées par le gouvernement du Cameroun. Les restrictions, qui sont en vigueur depuis le 17 janvier 2017, visent spécifiquement les régions anglophones du Cameroun, faisant suite aux manifestations contre la marginalisation des droits culturels et linguistiques des Camerounais anglophones par le gouvernement.
Pertinence du Droit International
En juillet 2016, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (CDH NU) a adopté une résolution historique sur la promotion, la protection et la jouissance des droits de l’homme en ligne condamnant sans équivoque les mesures visant à “prévenir intentionnellement ou perturber l’accès à la dissémination de l’information en ligne en violation du droit international des droits de l’homme “. Le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies est allé plus loin en appelant” tous les États à s’abstenir et à cesser de telles mesures. “
En novembre 2016, la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP) a affirmé la Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique selon laquelle “chacun a la possibilité d’exercer le droit à la liberté d’expression et à l’accès à l’information sans discrimination” par l’adoption de la Résolution sur le droit à la liberté d’information et d’expression sur Internet en Afrique , dans laquelle elle a également noté sa préoccupation “par la pratique émergente des États parties d’interrompre ou de limiter l’accès aux services de télécommunication tels que l’Internet, les médias et les services de messagerie, de plus en plus pendant les élections “. Le Principe II (2) qui est particulièrement pertinent, dispose que “toute restriction à la liberté d’expression doit être prévue par la loi, servir un intérêt légitime et être nécessaire dans une société démocratique”.
Impact des coupures d’internet
Reconnaissant que les droits de l’homme hors ligne doivent nécessairement s’appliquer en ligne, APC craint qu’en plus de limiter indûment les droits d’information et d’expression des segments de la société camerounaise, ainsi que leur droit d’association et de rassemblement pacifique, les coupures d’internet menacent aussi les droits économiques, sociaux, culturels et linguistiques des camerounais anglophones, et expose involontairement tous ceux qui en sont victimes au risque de nuire. Nous notons en outre comment l’Internet et d’autres coupures de communications ont, dans le passé, précédé des violations flagrantes des droits de l’homme – qui doivent être évitées à tout prix par le gouvernement camerounais.
Ici, nous attirons l’attention du gouvernement du Cameroun sur plusieurs conséquences imprévues qui pourraient résulter probablement de cette coupure de l’internet:
-
La capacité des citoyens à communiquer entre eux sur les risques imminents pour les personnes et les biens dans les régions touchées est gravement compromise, ce qui les expose au danger et aux dommages.
-
Les coupures d’Internet ont un impact direct et négatif sur les économies nationales et régionales, retardant ainsi les progrès vers la réalisation des objectifs de développement.
-
Les coupures, même brèves, présentent des risques importants pour les investisseurs dans la fourniture de l’infrastructure de réseau fixe et mobile, y compris le départ des investisseurs. Ceci non seulement entrave directement la participation significative des citoyens dans la société de l’information et les économies, mais aussi la réalisation des Objectifs essentiels du Développement Durable .
APC appelle donc le gouvernement du Cameroun à :
-
Ordonner la réintégration immédiate de la connectivité Internet pour tous les citoyens et résidents du Cameroun.
-
Prendre des mesures urgentes pour arrimer les instruments législatifs et réglementaires du Cameroun au droit international en ce qui concerne l’application de tous les droits de l’homme reconnus à l’espace en ligne. Nous attirons particulièrement l’attention du gouvernement sur l’instructivité de la Déclaration Africaine des droits et libertés de l’internet qui fournit un cadre élaboré par l’Afrique pour la gouvernance et la réglementation de l’Internet dans un contexte africain.
-
Garantir que les droits de l’homme de toutes les personnes au Cameroun sont pleinement respectés en ligne et hors ligne.
A propos d’APC
L’Association pour le progrès des communications (APC) est une organisation et un réseau de 50 membres organisationnels dans 36 pays, avec son bureau principal d’exploitation à Johannesburg, en Afrique du Sud. La vision d’APC est que toutes les personnes aient un accès facile et abordable à un Internet libre et ouvert pour améliorer leur vie et créer un monde plus juste. Elle a pour mission de responsabiliser et de soutenir les organisations, les mouvements sociaux et les individus dans et par l’utilisation des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) pour construire des communautés et des initiatives stratégiques afin de contribuer de manière significative au développement humain équitable, à la justice sociale et aux processus politiques participatifs ainsi qu‘à la durabilité environnementale.
Pour plus d’informations sur cette déclaration, sur notre travail en Afrique ou sur la Déclaration Africaine des droits et libertés de l’Internet, veuillez contacter:
Sekoetlane Phamodi
Coordonnateur des politiques de l’Afrique, APC
sekoetlane@apc.org